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La Musique en tête
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16 décembre 2007

Stéphan Eicher

EicherDans le monde bien rodé de la chanson contemporaine, le franco-suisse allemand Stephan Eicher apparaît comme un artisan, un amoureux des choses bien faites.

Côté texte d'abord, pour celui dont l'auteur fétiche et ami de longue date s'appelle Philippe Djian (37,2° le matin, ...). Côté musique ensuite, pour cet orfèvre qui aime à enregistrer dans les endroits les plus insolites et reculés: Carcassonne ou Engelberg.

Très médiatisé au plus haut de sa carrière (Déjeuner en paix, Pas d'ami comme toi, Combien de temps), Eicher peaufine désormais son oeuvre loin des médias, s'appliquant à construire un univers particulier que rien ne peut altérer, ni le temps, ni l'espace. Rencontre avec un artiste méticuleux et secret.

Des origines multiples

En écoutant parler cet étrange personnage qu'est Stephan Eicher, on est d'abord surpris par son accent, mi-rocailleux mi-chantant. Ce timbre si particulier qui colore sa musique, il le doit à ses origines, hésitant entre le peuple tzigane et la Suisse allemande, plus exactement Münchenbuchsee, près de Berne, où Stephan voit le jour le 17 août 1960.

Langue colorée et passion musicale bercent les jeunes années du chanteur. Son père, violoniste, donne à ses trois fils le goût des instruments. Aujourd'hui, à l'ombre de leur frère, les autres enfants Eicher vivent aussi de la musique, jazz et rock.

Adolescent, Stephan s'essaie aux arts, à tous les arts: musique, chant, écriture, théâtre, vidéo, cinéma (dont il gardera un goût prononcé pour l'image), rien ne fait peur à ce jeune homme pourtant solitaire.

A dix-sept ans, alors que son premier groupe The Noise Boys ne survit que quelques mois, son éclectisme "culotté" lui permet de rentrer en studio pour enregistrer seul un premier 45 tours Eisbar, qui rencontre un certain succès. En pleine époque punk, Eicher impose une musique expérimentale, née de son travail sur les instruments et les ordinateurs.

Européen

Européenne avant l'heure, la culture musicale de Stephan Eicher s'enrichit dès ses débuts de voyages et de rencontres: de l'Italie à l'Allemagne, en passant par la France ou sa Suisse natale, le jeune artiste tourne dans toute l'Europe et glane çà et là les inspirations nécessaires à l'élaboration de son image de marque.

Les filles de Limmatquai, son premier mini-album, Stephan Eicher spielt The Noise Boys, Souvenir, mais surtout l'album Chansons bleues en 1983 font découvrir cet artiste étrange qui n'est pourtant pas un débutant.

Cinq ans après Eisbar, Eicher hante les scènes françaises et les programmes des festivals les plus prestigieux, tels que Les Transmusicales de Rennes ou le Printemps de Bourges.

De cette époque date la découverte dans l'Hexagone du chanteur grâce à son album I Tell This Night, porté par le tube Two People In A Room. Ce titre passe en boucle sur les ondes et propulse son auteur sur la mythique scène parisienne de l'Olympia.

S'il chante principalement en français, on apprécie aussi sa façon unique de se jouer des frontières: allemand, anglais, français, ... Ses chansons sont universelles et ne sont pas sans rappeler les guitares des Dylan et Lou Reed dont Eicher est grand amateur.

Combien de temps...

...Est le tube de l'année 1987 en France et reste le morceau phare de Stephan Eicher. Il marque l'entrée du Suisse au Panthéon de la chanson contemporaine. Ses tournées sont vertigineuses et le public honore son idole par dizaines de milliers.

Source de liberté, le succès permet aussi au chanteur de chercher la note juste, sans concession au show-biz. Désormais, ses albums prennent le risque d'être moins populaires, moins rock, pour caresser l'harmonie et la quête de la perfection.

Fidèle à son goût pour les mélanges, Eicher allie avec allégresse les cordes, les dialectes locaux (Hemmige), les instruments traditionnels et ceux, plus contemporains, voire futuristes.

Engelberg en 1991, du nom d'un casino abandonné réaménagé en studio d'enregistrement, marque le début de la collaboration artistique d'Eicher et du romancier Philippe Djian, rencontré sur les plateaux de l'émission de télé Rapido.

Carcassonne, en 1993, marque définitivement le style Eicher d'une double obsession: celle des hôtels (cet album est enregistré dans le magnifique Hôtel de la Cité) et celle, plus profonde, des lieux de solitude bercés d'histoire et de beauté.

D'années en années, le chanteur s'offre le luxe de travailler sa musique en artisan du verbe et du son. Rien n'est laissé au hasard, ni le décor, ni la mise en scène, ni l'ambiance. Et le public est à nouveau séduit, même si la quête spirituelle de Stephan déçoit un peu les fans de l'époque Déjeuner en paix.

La tournée 94 donne naissance à un double album live, Non ci badar, guarda e passa (Ne pas s'arrêter regarder et continuer).

Expériences

Devançant de quelques années le tout récent Hôtels, cet album offre à l'auditeur plus de deux heures de pure magie. Les meilleurs titres d'Eicher en public d'une part, des extraits, des inédits, des bandes sons, toute une bibliothèque secrète d'autre part, le tout magnifiquement orné sous l'apparence d'un livret cartonné.

Indéniablement, Stephan Eicher cherche à séduire par son authenticité et la perfection de son travail. Mais cette indépendance vis-à-vis du système a un prix. Les albums se vendent moins (1000 vies en 1996 ou Louanges en 1999 en sont l'exemple), même si l'artiste continue à satisfaire un public fidèle à travers le monde.

C'est notamment sur scène que se perpétue la magie Eicher, d'Europe en Asie, d'Amérique du Sud en Afrique. Le chanteur consacre la majeure partie de son temps à l'errance, mais à une errance salvatrice et calculée: chacun de ses voyages apporte de la matière à la construction de son style bigarré. Un mélange unique de dialectes locaux et de grandes étendues musicales, sur fond d'instruments traditionnels et contemporains.

Hôtels, double album superbement illustré sorti l'été 2001, offre, à la manière de Non ci badar..., un florilège des tubes "anciens" d'Eicher et des versions inédites ou expérimentales.

Bien moins médiatisé qu'au plus haut de sa carrière, lorsqu'il chantait dans toute l'Europe Combien de temps, Déjeuner en paix, ou Pas d'ami comme toi, Stephan Eicher n'en est pas moins un artiste contemporain très populaire et apprécié.

Par sa volonté de rester honnête et authentique, et par sa collaboration fructueuse avec le romancier Djian, Eicher produit une musique hors du commun que colorent ses origines multiples. A lui seul, et à la manière du belge Arno, Eicher est le digne représentant d'un art sans frontière, humain et coloré.

Sébastien Brémont

Source: Ramdam

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